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L’industrie ovine et les théories du complot

Depuis le retour naturel du Loup en France, fin 1992, l’industrie ovine est la spécialiste des théories du complot et fausses nouvelles (« fake news »).

Il y a eu, dans un premier temps, la théorie de la réintroduction du loup.

Celle-ci a connu plusieurs variantes :

  • le loup a été réintroduit par des écolos extrémistes
  • le loup a été réintroduit par une ancienne ministre de l’environnement
  • le loup a été réintroduit par des gardes du PN du Mercantour (la théorie préférée d’Estrosi)
  • le loup a été réintroduit par un « commando en 4L » (sic)
  • des Italiens ont réintroduit le loup, etc…

Il ne manque que la CIA, le FSB, les Illuminati et les extra-terrestres…

Bien que l’ensemble des scientifiques ait indiscutablement démontré que le « loup français » est Canis lupus italicus, naturellement revenu d’Italie, certains continuent de croire en cette théorie du complot.

Néanmoins, comme l’énormité de cette légende urbaine faisait de moins en moins d’adeptes, il y avait urgence à ce que les industriels ovins trouvent une nouvelle théorie.

Il y a un peu moins de 2 ans, une rumeur a commencé à circuler chez les anti-loups : Canis lupus italicus n’existe pas, c’est un « bâtard ».

Et qui dit « bâtard », dit absence de statut d’espèce protégée…

Comme toute bonne théorie du complot qui se respecte, il y a toujours une (petite) part de vrai.
Pour ce qui est de l’industrie ovine, elle est des plus simple : la quasi totalité des prédations sur les troupeaux sont le fait de chiens errants ou divaguants. Cela est factuel et c’est bien la seule chose qui le soit.

Si un certain nombre de pseudo éleveurs ou de pseudo bergers se comporte comme des bas de plafond, leurs syndicats qui tirent les ficelles ne sont pas que des idiots.
La légende du « bâtard » a muri, entretenue par une presse quotidienne régionale plus soucieuse de plaire à ses lecteurs qu’à les informer. Les lobbies et les figures folkloriques – comme le Dollo – ont maintenu la flamme de cette fausse nouvelle.

L’apothéose a été la conférence de presse (22/11/17), annoncée comme un nouvelle épisode de « House of Cards », durant laquelle les industriels ovins allaient dévoiler le plus grand complot du monde : il n’y a jamais eu de loup en France mais des hybrides. Fermez le ban !

Comme nous a dit un jour un industriel ovin, « on sait ce que veulent les journalistes parisiens et ils sont faciles à enfumer« …

Hélas pour nos vendeurs de « bêtes de rente », la fausse nouvelle était peut-être un peu grosse et surtout mal ficelée.
L’ONCFS, qui arme et encadre la Brigade Loup de sinistre réputation, a même dû produire des éléments de langage pour écrire que, cette fois-ci, les industriels ovins en faisaient trop dans la manipulation.

Nous vous laissons lire les conclusions de l’ONCFS à ce sujet. Elles sont édifiantes…

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En effet, concernant l’étude présentée, de nombreuses réserves peuvent être formulées :

A – le prélèvement et la manipulation des échantillons
– La méthode de collecte par écouvillonnage au niveau des plaies représente un risque majeur de pollution de l’échantillon, qui est d’ailleurs révélé sur les 3⁄4 des échantillons traités, au vu des résultats présentés des analyses.
– Rien n’est dit sur la conservation et le transport de ces échantillons ni même sur la traçabilité ou encore le conditionnement. Il faut savoir que l’étuvage fragilise l’ADN, d’autant plus quand il est dégradé et rare.

B – l’analyse génétique elle-même
– Aucune répétition des amplifications n’est effectuée, un prérequis pourtant majeur sur ce type d’ADN dans la littérature internationale, afin d’éviter les faux génotypages.
– Selon Antagène, 10 marqueurs ne sont pas suffisants pour détecter l’hybridation sur de l’ADN rare et dégradé, d’autant qu’il n’est pas mentionné ni le degré de polymorphisme, ni le seuil de marqueurs «répondants» pris en compte parmi ces 10 pour considérer l’analyse comme fructueuse. Historiquement, le laboratoire qui traitait les analyses génétiques pour le compte de l’ONCFS utilisait 6 marqueurs, puis 12, mais à une époque où la technologie génétique n’était pas si avancée et où le sujet de l’hybridation n’était pas traité.
– Les allèles rares, faux allèles et encore moins des pertes alléliques ne sont pas considérés, alors que ces phénomènes sont largement connus en biologie moléculaire, (on peut s’en prémunir par la répétition des amplifications).
– Des erreurs apparaissent dans l’explication des analyses : les marqueurs ne sont pas situés sur les 0,1% du génome différent entre loup et chien, ils sont situés partout sur le génome, c’est la différence d’occurrence des allèles sur chaque marqueur qui renseigne sur la probabilité qu’on ait affaire à un loup ou à un chien.
– Au sein du génome nucléaire, on ne peut pas dire qu’il y a des gènes de loup ou de chien, ni même qu’il y a des marqueurs de loup ou de chien, ni même encore qu’il y a des allèles de loup ou de chien. Il y a des probabilités d’occurrence des allèles sur chaque marqueur plus ou moins importante pour un loup ou un chien. C’est la combinaison de l’occurrence de ces allèles sur les marqueurs, en comparaison à une population de référence, qui permet de dire si l’échantillon a de forte probabilité ou pas d’appartenir à la population.
– Quand un seul allèle apparaît, ça n’est pas forcément un homozygote. Ca peut être une perte d’allèle (et donc un questionnement sur la qualité de l’ADN présent).
– Quand 3 allèles apparaissent, ça n’est pas forcément qu’il y a 2 individus. Il peut y en avoir beaucoup plus.
EDL suite à la conférence de presse du 22/11/2017 – ONCFS – NT/2017/DRE/UPAD/01 – 2 sur 3
– L’absence d’allèle Y ne veut pas forcément dire qu’on a affaire à une femelle, quand il s’agit d’ADN rare et dégradé, les pertes d’allèles sont courantes.
– L’ONCFS et Antagène n’ont pas connaissance d’allèles spécifiques de certaines lignées sur les marqueurs microsatellites. La lignée d’appartenance ne peut s’étudier que sur une zone bien précise de l’ADN mitochondrial par lecture de séquence (et non sur les microsatellites) et on ne peut donc renseigner que la lignée maternelle.
– L’étude présente un «allèle 80» comme étant un marqueur de la lignée italienne. Cette dénomination dénote une incompréhension des notions génétiques. Un allèle ne s’exprime qu’en référence au marqueur qui le porte. Quel est le marqueur ici ?

C – la lecture et l’interprétation des résultats
– ForGen n’est pas le laboratoire référent pour les analyses génétiques Loup en Allemagne (communication de nos collègues allemands) et n’a jamais publié ses méthodes dans des publications sur ce sujet. Il ne le fait d’ailleurs pas ici.
– Aucune lecture des résultats en double aveugle n’est mentionnée.
– Aucune explication des méthodes mathématiques pour l’assignation au loup ou au chien n’est fournie,
aucune répétition des calculs mathématiques d’assignation n’est mentionnée, aucun seuil statistique
pour l’assignation à l’une ou l’autre des populations (chien ou loup) n’est affiché.
– Aucun indice de qualité final de chaque analyse n’est indiqué
– Sur 120 échantillons analysés, 20 analyses sont complètes, ce qui est la traduction de la très faible
qualité des échantillons et analyses qui en deviennent ininterprétables.
– Tous sont classés en hybrides. Selon l’ONCFS, les profils génétiques présentés résultent de mélanges
d’ADN appartenant à une ou plusieurs espèces, qu’il n’est pas possible de démêler au travers de la
méthode utilisée.
– Même si ces 20 échantillons étaient tous hybrides, on ne pourrait pas extrapoler en affirmant que la
population lupine française serait 100% hybride. Sont-ce des individus identiques ? Au vu de la faible qualité des réstultats, on ne peut pas extrapoler sur le nombre d’individus différents.

2- Sur la pertinence des autres analyses
La méthode des crânes n’est pas pertinente (cf travaux de Orsini & Fabre, Muséum d’Histoire Naturel de Toulon): on peut parvenir à discriminer les petits chiens des gros loups, en prenant en compte une combinaison de mesures allométriques, c’est-à-dire pas uniquement la mesure du crâne. Mais le pouvoir de discrimination pour les crânes de taille moyenne reste statistiquement trop peu fiable.

Dans l’étude présentée, la personne citée comme experte sur cette méthode des crânes est connue pour travailler également sur des classifications de chiens, loups et hybrides à partir des mesures morphométriques et leurs angles d’orientation sur des individus sur des photos de pièges photos et sur des empreintes des pattes.
Aucune base scientifique n’est publiée à ce sujet nulle part dans le monde.

Sur un autre domaine, se pose la question de la provenance des crânes analysées par ce collectif de particuliers, et des autorisations de détenir et transporter tout ou partie d’espèce protégée.

En conclusion,
Il subsiste de nombreuses approximations, même sur le plan technique et scientifique. Nous tâcherons de les lever avec l’aide des laboratoires prestataires, de part et d’autre. Cependant, cette étude se place davantage sur le plan politique de remise en cause de l’Etat, et de l’ONCFS en particulier.

Sur le sujet de l’intox à l’hybridation, nous vous invitons à (re)lire l’article de Roger Mathieu et le communiqué de presse de l’ONCFS suite aux analyses génétiques menées par le laboratoire ANTAGENE (laboratoire indépendant et spécialisé dans ce domaine).

Sur 130 traces distinctes analysées, il n’y a que 2 hybrides F1.
Cela veut dire qu’il n’y a pas de phénomène d’hybridation naturelle en France et que les loups sont bien des Canis lupus italicus.

Est-ce à dire qu’il n’y a pas d’hybride en France ? Hélas, non…

En effet, la France abrite des trafiquant.e.s de loup/hybride. Les canidés « produits » sont nombreux et se vendent bien.

Est-ce que les autorités sont au courant ? Oui, et depuis plusieurs années.
Les premiers à avoir « tiré la sonnette d’alarme » sont des associations européennes. Mais les autorités ont préféré faire la sourde oreille et fermer les yeux…jusqu’à ce que le phénomène explose.

Au lieu de mettre tout en oeuvre pour exterminer le Loup, Nicolas Hulot ferait mieux de s’occuper sérieusement des trafiquant.e.s et de préparer les structures d’accueil pour les loups/hybrides, premières victimes de la cupidité de ces délinquant.e.s !

Pour en terminer sur la fausse nouvelle de l’hybridation répandue par les industriels ovins, nous pouvons leurs donner quitus sur point : pas de loup, donc pas de subvention d’indemnisation…

association Le Klan du Loup 

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