Photographie d'un loup de Chabrieres, couché sur un rocher.
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Suiveur de Loup

« On le suit à la trace… » L’expression est rarement si juste que s’agissant du loup, depuis qu’il a pointé son museau sur un sommet du Mercantour, un beau matin de novembre 1992. À peine la nouvelle de son retour en France avait-elle été rendue publique, en avril 1993, que le ministère de l’environnement chargeait Geneviève Carbone d’une mission d’observation de la première meute installée autour du vallon de Mollières.

La jeune universitaire, spécialiste de l’espèce, fit rapidement une cartographie des allées et venues très réguliers de ces grands animaux. Mieux, à force de patience, elle découvrit un jour la tanière où étaient sans doute nés les premiers louveteaux de France. Depuis, le protocole de suivi du loup, de ses déplacements, de ses mœurs, de sa reproduction et, bien entendu, de son régime alimentaire, s’est progressivement perfectionné.

Aujourd’hui, la « stratégie de récolte et d’analyse des indices de présence du loup » fait l’objet d’une double page très pratique, rédigée par l’ingénieur Christophe Duchamp, de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Dans son bureau de la Maison du parc national, à Saint-Martin-Vésubie, Gérard Millischer, « protocole Duchamp » en main, explique comment il participe depuis dix-huit ans à ce suivi scientifique.

ISOLEMENT DU RESTE DU MONDE

Ce naturaliste de terrain a vécu une aventure peu commune. Dès janvier 1994, il s’est installé chaque hiver, pendant cinq ans, dans deux pièces d’une maison délabrée du hameau de Mollières, un écart d’altitude à moitié ruiné, complètement isolé du restant du monde pendant au moins les cinq à six mois – de décembre à avril – où les pistes forestières qui y conduisent sont recouvertes de neige.

Restant seul parfois pendant quatre semaines d’affilée, ravitaillé épisodiquement par des collègues qui venaient en skis de randonnée ou en raquettes, Gérard Millischer est devenu rapidement un ermite naturaliste, entièrement tourné vers l’observation quotidienne des premiers loups de France, de nuit comme de jour, grâce à des jumelles de vision nocturne à infrarouges.

Écoutant l’avis éclairé de son collègue et ami Patrick Orméa, qui lui conseilla de sortir le moins possible du hameau, « l’espion des loups » – ainsi fut-il rapidement désigné par les rares randonneurs qui le croisaient – récolta, au fil de ses semaines de solitude, des dizaines d’observations, chacune faisait l’objet d’un « rapport » , mais aussi les premières photos de loups sauvages en France, et même des vidéos nocturnes saisissantes, où l’on assiste à de nombreuses tentatives de prédation sur les hardes de cerfs, de chamois, de mouflons et même à une course-poursuite presque comique avec un lièvre…

LA PREMIÈRE CAPTURE D’UN LOUP

Gérard Millischer se souvient particulièrement de sa première observation : « C’était en mars 1994. Deux loups sont restés à 80 m de moi, sans me voir. » Ensuite, il y eut cette première photo d’un grand loup solitaire, prise à la va-vite en avril 1995, et cette autre, de mars 1996, où l’on aperçoit cinq loups qui se suivent dans la neige, au soleil.

Bien entendu, ces souvenirs relèvent plus de l’émotion que de la science, mais l’agent du parc national aime aussi montrer les comptes-rendus et d’autres images du suivi technique du loup. Sur l’écran de son ordinateur, il est alors possible d’assister à la première capture d’un loup – une louve en l’occurrence – par piégeage inoffensif au sol, le 13 juillet 2009, à 1 h 15 du matin, en haute Tinée.

Gérard Millischer en fut l’opérateur, avec Gérard Caratti, un autre technicien du parc national. Après l’anesthésie réalisée grâce à une canne seringue, les deux hommes ont estimé qu’ils avaient affaire à une femelle de 6 ans environ, lui ont posé rapidement un collier radio émetteur (VHF) et ont fini leur action par quelques prélèvements sanguins. Une fois toutes ces manipulations délicates terminées, l’animal s’est réveillé et a repris le chemin de la montagne où un autre loup l’attendait manifestement, hurlant à proximité du lieu de la capture durant toute l’opération.

PAS DE DONNÉES SUR LA PRÉDATION DU LOUP

Dès lors, trois autres louves ayant été équipées de colliers, un important programme de recherche dit « programme prédateur-proies » (PPP) a permis de récolter des informations considérables sur les rythmes biologiques des meutes (reproduction, notamment), leur utilisation de l’espace (déplacements, tanières) et, surtout, sur l’impact de leur prédation sur les ongulés sauvages, mouflons et chamois principalement.

Selon Gérard Millischer, les premiers résultats de ce suivi systématique piloté par l’ONCFS semblent démontrer que les populations de proies ne sont pas diminuées par les attaques de la cinquantaine de loups aujourd’hui présents sur tout le massif du Mercantour. Mais, à sa grande déception, le PPP a été officiellement arrêté l’été dernier.

À Nice, Alain Brandeis, directeur du parc national, espère que cette recherche exceptionnelle reprendra prochainement, ou du moins que ses premiers résultats seront rapidement publiés. « C’est dommage, regrette-t-il, car nous n’avons toujours pas assez de données sur la prédation pour éclairer un débat bien légitime. » Peut-être son appel sera-t-il entendu par les ministres de l’écologie et de l’agriculture, sa tutelle, lorsque le parc national, doté bientôt d’une nouvelle charte (en cours d’examen par le Conseil d’État), bénéficiera d’une adhésion plus ferme des communes qu’il couvre aujourd’hui.

La Croix
Photographie d'un loup de Chabrieres, couché sur un rocher.
Loup de Chabrières

Si le Programme Prédateur-Proie (PPP) a été supprimé, cela doit être lié au fait que le Loup ne fait pas diminuer la population de proies, contrairement aux légendes racontées par les anti-loups.

Peut-être aussi que ce programme a permis de démontrer qu’il n’y avait pas tant de prédations de Loups sur les troupeaux ovins et/ou caprins.

association Le Klan du Loup

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